RECONSTRUIRE LE LIEN ENTRE LES ESPACES AU MALI
- Un Coin Du Sahara
- 12 juil. 2020
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 22 oct. 2020
Reconstruire le lien entre les espaces au Mali
De quelles espaces s’agit-il ?
Politique
Sectoriel
Territorial ou géographique
Socioculturel
Qu’est-ce que ces espaces offrent ?
Politique – mieux appréhender les exigences de la représentativité et de la redevabilité des élites pour renforcer la légitimité de l’Etat. Éclaircir le rapport de l’Etat avec les acteurs (mieux comprendre le rôle de l’Etat avec les entités territoriales, religieuses, socioculturelles, économiques).
Sectoriel : économique, sécuritaire, sanitaire, etc. – Mieux scruter les aspects sectoriels locaux et nationaux pour générer une économie durable et convenable à la société.
Territorial ou géographique - La cartographie actuelle du Mali qui compte 703 communes, 19 régions, 78 cercles et 348 arrondissements, entités géographiques mérite d’être une base de réflexion ou de réflexivité quasi permanente.
Socioculturel – Les caractéristiques et situations socioculturelles sont des facteurs sociaux et culturels faisant partie de l’ensemble pays et de ses composantes. Le paysage socioculturel n’est pas aussi immuable qu’on le pense. La reconnaissance et la valorisation de la diversité au sein des groupes sociaux et entre eux.
Reconstruire les liens entre les espaces pour promouvoir la démocratie
Au Mali, Il y a nécessité d’un dosage équilibré entre deux perceptions : La « démocratie » qui se comprend comme un processus qui affirme, permet et garantit la liberté et la liberté qui évoque pour certains le débordement, le désordre, pour d’autres le respect et l’application du droit.[1] En acceptant que ce constat, n’est pas que malien uniquement !
Reconstruire du lien entre les espaces au Mali est une voie pour une refondation de l’Etat afin qu’il gagne en légitimité et en efficience. La mobilisation et la reconnaissance des liens entre les espaces et à l’intérieur de chaque espace politique, social, sectoriel et géographique est un exercice à réinventer pour absorber les crises répétées que traverse le pays. L’expression et la continuité de la démocratie sont liées à la qualité et au dynamisme des liens dans chacun des espaces et entre ces quatre espaces. A chaque fois, que ces liens s’affaiblissent ou sont affaiblis, la démocratie en pâtit. La reconstruction des liens entre les espaces est essentielle pour impulser les pratiques démocratiques au Mali. Faire émerger les complémentarités entre les espaces (politique, sectoriel, géographique et socioculturel) nécessite une mise en lien de ces espaces. La mise en lien de ces espaces permet d’assurer la résilience et la viabilité du processus démocratique.
La transversalité pour questionner les institutions et les espaces
La transversalité doit devenir une préoccupation de tous les instants. Elle implique une connaissance de L’environnement, des contraintes, des besoins, des objectifs et du potentiels à l’intérieur de chaque espace et de leur mise en commun. La transversalité requiert des conditions nécessaires aux échanges. Une coopération des acteurs des différents espaces est indispensable pour une transversalité. Cette coopération s’inscrit aussi dans le temps. La transversalité peut résulter d’une démarche volontariste qui dépasse les clivages de personnes, d’institutions. Elle s’inscrit dans la recherche d’une vision d’ensemble pour une solution collective par la coopération de tous.[1]
Valeurs sociétales pour impulser les institutions et la transversalité
Les institutions, les valeurs sociétales assurent un rôle important dans la transversalité entre ces quatre espaces et au sein de chaque espace. Les institutions sont aussi le cadre et la contrainte dans laquelle doit se dérouler la démocratie. La réalisation par l’Etat de sa part du contrat social permet la fonctionnalité des institutions. Selon J.J. Rousseau, une Institution démocratique est une structure avec une origine convenue et une fonction attribuée. Une institution démocratique fonctionne en respectant un équilibre entre ces deux qualités. L’institution est la tragédie de la démocratie parce qu’elle est à la fois ce qui la permet et ce qui peut l’étouffer. [2] Les institutions inter-actent selon un processus démocratique. Dans cette conception, les pouvoirs sont des fonctions, et non des institutions.
Pour comprendre les possibilités et les processus de changement, le niveau d’institutionnalisation des pratiques doit être pris en compte. La manière dont les institutions fonctionnent façonnent les comportements humains. Plus une institution est tenue pour acquise, plus le changement est difficile. Les pratiquent institutionnalisées sont tenues pour acquises. Lorsque les institutions apparaissent comme particulièrement inadaptées pour répondre aux changements du contexte (Seo et Creed, 2002). la recherche d’alternatives et une action impliquant la mobilisation et l’action collective sont utilisées. (Benson, 1977)[3]. En scrutant les aspects sectoriels et en générant entre autres, une économie, une justice, une sécurité, une santé, une éducation qui sont durables et convenables à la société.
La transversalité fortifie la relation Institution.s – Démocratie. Elle génère la capacité de bâtir et de réduire, voire, supprimer les abus (de pouvoir, par exemple).
Idéal démocratique pour renouveler la légitimité de la démocratie aux yeux des citoyens.
Réfléchir sur l’idéal démocratique que l’on veut atteindre et le renouveler aussi souvent que nécessaire doit être un exercice permanent. Engendrer un tel idéal, nécessite la conception d’institutions qui puissent y contribuer. Institutionnaliser la réflexivité accélère la pratique de la démocratie dans les espaces sus mentionnés.
Une des faiblesses majeures reprochée à la démocratie malienne par les citoyens est l’absence de prise en compte ou la mauvaise interprétation de nos us et coutumes. Selon cette opinion, cette faiblesse aurait coûté beaucoup à la stabilité de notre pays. Aux yeux de certains citoyens, ce manquement constitue également un handicap pour les institutions. Au-delà de la dérive tant décriée des hommes politiques, ce ressentiment peut conduire à une défiance vis-à-vis des institutions. En période de crise, ce désenchantement a entraîné un rejet des institutions par une part importante des citoyens qui ne se sentent pas suffisamment attachées ni aux institutions, ni aux hommes qui les dirigent.
Le paysage institutionnel démocratique, même bien tracé, doit s’accompagner d’une justification des institutions ancrée dans les valeurs des sociétés en question et celles universelles. Pour rendre crédible nos institutions aux yeux du citoyen, il importe de faire un travail permettant de reconnaître les valeurs sociétales que ces institutions portent. De même, il importe d’expliquer pourquoi certaines valeurs n’ont pas été retenues ou doivent être dépassées.
L’histoire spécifique de chacune de nos sociétés et leur histoire partagée ont des visions communes qu’il faut interroger. Parmi ces visions, la justification morale de tout acte dans la relation entre le citoyen et la société. La perception de la corruption en est un exemple : nos sociétés incitent au partage, à la solidarité, elles interdisent le vol et l’accaparement. Certains experts ont expliqué la corruption par une valeur sociétale de partage, comme si d’autres valeurs endogènes ne pouvaient lui être opposée. Qu‘il s’agisse de la corruption ou d’autres problématiques nos sociétés ont des garde-fous. Ces garde-fous ne sont pas suffisamment reconnus et valorisés par nos institutions. Le cas de de la charte de Kourouganfougan est l’exemple, les similarités et les complémentaires entre cette charte et notre constitution moderne n’est pas systématiquement fait. Il importe de faire ce lien.
Il ne suffit pas de tracer l’ensemble du paysage institutionnel entourant l’action de l’État pour la catalyser. Les institutions doivent incarner dans leurs organisations et fonctionnement les normes démocratiques, mais ces normes démocratiques naîtront des valeurs qui sont propres à nos sociétés qui sont compatibles avec les valeurs universelles.
La logique démocratique telle que pratiquée dans notre pays apparaît abstraite pour certains citoyens. Le droit moderne se lit, s’interprète de façon nuancée par les juristes et constitutionnalistes. Mais pour le citoyen ce droit ne reflète pas ou fait insuffisamment le lien avec certaines valeurs auxquelles il est attaché. Quand le citoyen doute de l’action des institutions, il se retourne vers des valeurs qu’il connait mieux. Or, la démocratie n’est autre que l’expression universelle de ses propres valeurs. Là aussi, le lien devrait être réintégrer. L’aura des religieux par rapport à la faible capacité constatée des politiciens à mobiliser les citoyens en est un autre exemple.
Les citoyens cherchent un système politique, judiciaire, économique et sécuritaire dans lesquels ils se reconnaissent. Au-delà de la bonne santé économique, de l’exercice de bon fonctionnement de l’Etat et de ses structures, la légitimité du pouvoir ne peut se construire qu’à travers des institutions qui inspirent confiance aux citoyens. Pour renforcer la démocratie et ces institutions, il est nécessaire d’en renouveler aux yeux des citoyens la légitimité. La bonne santé de la démocratie au Mali requiert un contrôle effectif des pouvoirs.
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